Une enquête exclusive de l’association L214 dévoile l’intérieur d’un élevage de visons en France. Entassés à plusieurs dans des cages exigües, les bêtes vivent dans leurs propres excréments. L’association a décidé de porter plainte contre cet élevage de Vendée, non seulement en raison des atteintes aux droits des animaux mais aussi pour non respect de la législation en matière environnementale. En outre, alors que 84 % des Français sont favorables à une interdiction des élevages d’animaux à fourrure en France, L214 demande que la pratique soit abolie.
Des visons qui se marchent les uns sur les autres, des cages jonchées d’excréments et des eaux polluées évacuées dans la nature. Les images dévoilées par L214 sont particulièrement troublantes, d’autant qu’elles ont été filmées en France, où les élevages de visons sont une réalité peu connue du public. Pourtant, il existerait une dizaine de fermes de ce type dans l’Hexagone, dans lesquelles des visons d’Amérique sont élevés exclusivement pour leur fourrure.
Des visions détenus dans des conditions insalubres
Dans cette ferme de Vendée dont L214 dévoile l’intérieur, se côtoient plusieurs milliers de visions (5000 selon l’association). C’est la vétusté des installations et le caractère exigüe des cages dans lesquelles les animaux sont retenus, en général à trois, qui marquent en premier lieu. L’absence d’eau pour ces bêtes semi-aquatiques est également flagrant. La vidéo diffusée par L214 montre par ailleurs que les locaux dans lesquels les animaux sont élevés sont insalubres. Faute d’entretien et de nettoyage, les bêtes vivent dans leurs excréments qui s’amoncellent entre les grillages des cages et au sol, à proximité des déchets de nourriture carnée. Des traces d’auto-mutilation ont également pu être observées. Pour l’association, il s’agit de « conditions qui ne répondent pas aux besoins biologiques des visons » qui sont des animaux solitaires, qui s’isolent plusieurs heures par jours et qui vivent à proximité de sources d’eau.
Par ailleurs, l’association dénonce les nombreux manquements en ce qui concerne les hangars dans lesquelles se trouvent les cages. Une partie des eaux au sol, chargées en excréments (qui contiennent du N2O (oxyde nitreux) et du NH3 (ammoniac), ne serait pas filtrée et finirait dans la nature, conduisant à une pollution des nappes phréatiques et des cours d’eau ainsi qu’une acidification des sols. Pour l’association, l’élevage « pollue les cours d’eau, et représente un risque pour la biodiversité ». Il ne s’agit donc pas qu’une question de droit animalier mais également d’écologie.
La France en retard sur ses voisins européens en matière de réglementation
Cette situation est la conséquence de « grosses lacunes au niveau des contrôles » dans le pays, et d’un « manque de volonté politique, puisqu’en absence de texte, il n’y a pas de sanctions prévues » explique Isis La Bruyère pour L214. Face à ces constats, L214 dénonce que la France ne se soit dotée d’ « aucune réglementation spécifique à l’élevage des animaux à fourrure », accusant un retard important sur bon nombre de ses voisins européens et déplore que « la France n’applique pas la Recommandation du Conseil de l’Europe relative à l’élevage des animaux à fourrure alors qu’elle y est contrainte par la Convention Européenne sur la protection des animaux dans les élevages ». En vertu de ce texte, les animaux élevés pour leur fourrure doivent être élevés dans des conditions qui répondent à leurs besoins biologiques. Dans le cas présent, l’absence de cachettes, de point d’eau, de paille et le manque d’espace contreviennent à cette obligation selon l’association.
En Europe, la France fait partie, avec les pays de l’Est, des derniers pays à ne pas encore avoir légiféré à propos de l’élevage des animaux à fourrure. D’autres pays, comme la Norvège (d’ici 2025), l’Angleterre ou encore les Pays-Bas ont tout simplement interdit la pratique. Chez nos voisins allemands et belges, il existe désormais des réglementations strictes afin d’encadrer ces activités. Pourtant, les Français sont très largement pour une telle interdiction. Selon un sondage commandé par L214 auprès de YouGov, 84 % d’entre eux s’expriment de manière favorable à l’interdiction des élevages des animaux à fourrure. Combien de temps faudra t-il alors encore attendre pour que le législateur intervienne ? Une chose est certaine, comme à l’étranger, une médiatisation intelligente et la pression citoyenne peuvent faire bouger les lignes.
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