L'année 2017, l'année de mes 42 ans, a été pour moi une période charnière, entre des années de travail dans l'informatique en tant qu'administrateur système, et un avenir que je ne connaît pas encore.
Mais si toutes les périodes de transitions ne sont pas douloureuses, ça n'a pas été le cas de ce que j'ai vécu. Vraiment pas.
Aujourd'hui je considère que cette année s'est divisée en quatre périodes, comme quatre saisons :
- une fin d'hiver au cours de laquelle j'ai travaillé chez un client final, anéantit de crises d'angoisses au point que je n'en pouvais plus,
- un printemps en arrêt thérapeutique fait de burnout et d'envie de suicide, durant mon arrêt de travail, qui s'est terminé avec l'annonce de mon licenciement,
- un été de préavis de licenciement et de chômage, au cours du quelle j'ai été un peu mieux, et où je n'ai malheureusement pas été aussi actif que je l'aurais voulu,
- et pour finir un automne très actif en terme d'activité associative, de vie sociale, et de vie professionnelle puisque j'ai même entamé une nouvelle formation.
Hiver
J'ai entamé le début de l'année alors que j'étais toujours empêtré dans des crises d'angoisses liées à mon boulot, où les conneries allaient de la réparation des imprimantes à des problèmes au niveau de l'administration Office 365, notamment la création de mail Outlook et l'adhérence avec l'AD.
Pourtant, j'aurais pu reprendre confiance en moi, puisque j'avais quand même une bonne connaissance du SI de ce client, qui me permettait d'alerter lorsqu'ils voulaient faire des évolutions.
Mais en même temps, j'étais tellement englué dans des problèmes quotidiens, l'angoisse de savoir que je parviendrais pas à résoudre le problème de l'AD, l'équipe de mon ESN ne m'apportant pas l'aide dont j'avais besoin, et en plus j'avais été transféré dans un bureau nul avec de la moquette, et de surcroît j'étais quand même victime de gaslighting de la part de mon N+1, qu'en définitive je n'ai pas tenu, et un matin j'ai quitté les locaux du client pour ne plus jamais y revenir.
Printemps
Il a été question d'un mi-temps thérapeutique, solution suggérée par la médecine du travail, mais cela ne s'est jamais fait.
Le mois de février a été particulièrement difficile.
J'étais arrivé au bout de mon système de croyance, qui affirmait que tout est possible à condition d'être méthodique, que l'on pouvait tout organiser, tout apprendre. Auparavant j'aurais considéré avec mépris que la dépression et le burnout n'étaient que des symptômes de faiblesses de l'esprit ; je ne pouvais plus affirmer de tels convictions (et ne le pourrait par ailleurs jamais plus).
Mes certitudes s'étaient écroulées. Même la marche du monde ne me paraissait plus digne d'intérêt : le changer, pourquoi ? Après tout je n'étais qu'une particule dans un chaos absurde, et tout compte fait, la seule chose que je pouvais faire pour rendre ce monde meilleur, c'était de ne plus en faire partie. L'un des seuls moment d'illumination au cours de ce printemps de cauchemar fût lorsque je découvris que je pouvais me tuer - j'en ai presque retrouvé le sourire.
Mes crises d'angoisses étaient violentes. Je ne sais plus ce qui a pu me faire tenir et m'empêcher d'opter pour une solution définitive, mais je doute que ç'ait été les anti-dépresseurs que je prenais à ce moment ; peut-être plus les séance avec ma psychothérapeute.
Eté
Mon moral s'est amélioré après l'annonce de mon licenciement. Pendant mon préavis et durant la première partie de mon chômage, j'ai voulu être actif, et je crains de ne pas l'avoir été autant que j'aurais pu l'être, notamment en matière d'activité associative et d'écriture.
J'ai envisagé une reconversion au point d'abandonner complètement l'informatique. Les ateliers de Pôle Emploi m'ont malheureusement convaincu qu'il n'y avait que dans ce domaine que je pouvais trouver un poste pouvant me satisfaire financièrement. Au départ j'ai voulu me tourner vers l'assistance à maîtrise d'ouvrage, et finalement un ami m'a convaincu de m'orienter vers la sécurité informatique.
Automne
A partir du mois de septembre, au cours d'un superbe automne, durant lequel nous pouvions nous promener en tee-shirt jusqu'à la mi-octobre, j'ai été nettement plus actif : cela a commencé avec le voyage au Canada, à Montréal pour le mariage d'un couple d'amis. Il m'a été très dur de vaincre mes angoisses en rapport avec les démarches administratives dans les aéroports, mais en fin de compte cela m'a permis de reprendre confiance en moi sur mes capacités à gérer des projets. D'ailleurs, je crois que je n'ai même pas pris de Xanax durant tout mon séjour.
Avant ce séjour, je n'avais pas vraiment profité de mon chômage pour prendre part à des activités associative, à part deux soirées que j'ai passé à La Paillasse, au début de l'année (un jeudi où j'ai rencontré le créateur de Nomade des Mers, et de voir son installation de production de spiruline, et un autre soir où se tenait une conférence sur l'IA et le monde médical).
J'ai été nettement plus actif après mon séjour à Montréal.
L'activité qui m'a fait vraiment le plus grand bien à été la participation à l'organisation du MMMFest : je crois que c'est durant ce festival que je me suis remis à croire que je pouvais apporter quelque chose au monde et aux gens que je rencontrais, et c'est à la suite de cela que mes crises d'angoisses ont vraiment disparues.
Parmi mes autres activités, je suis allé quelquefois au Grands Voisins, le squat situé dans l'ancien Hôpital Saint-Vincent de Paul, pour assister à des réunion avec Assemblée Virtuelle, j'ai assisté à une convention de fantastique, avec maison d'édition, jeux, conférence sur le jeu de rôle et cosplay, où j'ai trouvé une hématite pour remplacer le quartz que m'avait offert une ex et que j'avais perdu en allant chez ma psy, une autre conférence du Mouton Numérique sur le coût écologique d'internet et des datacenters et je suis quand même sorti dans des bars à de multiples reprises.
Enfin, cette année s'est achevée avec le début de ma formation en sécurité informatique. Il y a autant de technique que d'enseignement théorique dans ces cours, ce qui fait que je me suis enfin mis sérieusement au développement Python, et je me suis aperçu que les aspects législatifs et juridiques de la sécurité informatique m'intéressaient. De plus, je me suis aperçu qu'au sein de ma classe j'étais respecté.
Au cours de cette formation j'en ai profité pour refaire mon CV (le réinventer serait un terme plus exacte), de sorte que nombreuses furent les Entreprises de Services Numériques qui m'ont proposés des entretiens d'embauche - je les aient toutes acceptés, en enchaînant quelquefois plusieurs soir par semaine, afin de m'entraîner à parler de mon parcours. Si les débuts furent difficiles, m'être imposé cette contrainte a été payant puisque je suis maintenant nettement plus à l'aise.
La suite
Comme j'ai pu le constater, quelqu'un m'ayant connu avant cette année 2017 de cauchemar, et me retrouvant après n'aurait sans doute pas l'impression d'être en face de la même personne.
Reste à savoir ce que ce nouvel être que j'ai été contraint d'inventer pour survivre dans les moments les plus difficiles sera capable de faire.
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