Pour ce nouvel article, nous allons voir les différents liants en peinture. Ces derniers sont ce qui permet de fixer les pigments, particules poudreuses et solides, sur un support. Si les pigments sont globalement les mêmes d’un type de peinture à l’autre, le liant change radicalement le comportement d’une peinture.
Aussi dans un premier temps, pouvons-nous séparer les liants aqueux des liants huileux. Mais nous pourrions aussi marquer la différence entre les liants réversible ou non au solvant… Ou encore ceux dont l’utilisation nécessite une dilution au solvant ou à l’eau. Je vais pour ma part aborder les liants via le critère de solvabilité et de réversibilité. Je trouve ces critères importants lorsqu’on choisit sa peinture.
1 – Les liants réversibles
Les liants réversibles à l’eau se présentent sous une forme souvent poudreuse dans les magasins beaux-arts. On peut citer la gomme arabique, la caséine et le liant méthyl-cellulosique. Ces trois liants sont d’origines organiques et de par leur réversibilité sont essentiellement utilisés dans les gouaches. Ils sont tous les droits plus ou moins gourmands en eau, qu’ils absorbent.
La gomme arabique
…. est en fait une forme chimique de sucre. Elle est extraite de l’acacia, dont elle est la sève séchée en quelque sorte. Ce liant se présente de façon compacte dans les peintures avant de se diluer à l’eau. Une gouache ou un aquarelle très diluée ressemblent beaucoup à une encre en plus fluide dans un godet. Parmi les différents liants en peinture, la gomme arabique est l’un des plus ancien utilisé. Les gouaches et les aquarelle liée à la gomme s’utilisent sur papier. De fait, la gomme arabique se comporte autant comme un véhicule à pigment que comme un liant à proprement parlé.
Le liant méthyl-cellulosique
Liant composé à partir de la cellulose végétale. Oui, comme le papier. Cette matière brute polymérise et selon la réaction chimique, il formera les fibres du papier ou bien notre liant. On trouve la cellulose absolument partout : il compose entre 35% et 50% de la biomasse de la planète. Ce liant est très gourmand en eau et donc très économique : le dosage comprend très peu de poudre pour beaucoup d’eau. Il est utilisé dans les gouaches, mais aussi dans les badigeons ou les stucs (enduits). On peut aussi l’utiliser en émulsion eau-huile : ses molécules font le lien entre l’huile et l’eau et permet un mélange harmonieux et plus épais qu’à l’huile seule.
La caséine
C’est la protéine du lait. Lorsqu’elle réagit, elle polymérise c’est-à-dire que ses chaines de molécules s’allongent. La caséine ne reste réversible à l’eau que quelques heures ou jours, pour devenir totalement imperméables ensuite. Sur un support rigide et dur, comme du bois ou un mur, elle donne un film solide. Aussi n’est-elle pas adaptée aux supports souples et surtout, elle est moins souple d’utilisation que nos peintures modernes. Pourtant elle protège vraiment son support tout en le laissant respirer. On l’utilise aujourd’hui surtout dans les peintures décoratives : mélangée à la chaux, à un badigeon, à du plâtre… Elle les durcit et les rend plus durable.
La cire :
Préparée à chaud comme à froid, la cire est réversible à la chaleur. Car la cire ne sèche jamais vraiment, elle passe d’un état à un autre sans modification interne de sa structure. Elle ne « polymérise » pas. Hormis sa sensibilité à la chaleur (autour de 50°c), la cire est un liant exceptionnel. Car non seulement elle permet de travailler en couche fine et transparente, mais elle protège superbement bien les pigments.
A chaud, la cire se travaille en coulée de matière directement sur le support. Elle peut se diluer aux essences végétales comme la térébenthine. Ensuite, on la travaille à la chaleur directement sur le support pour exécuter les fondus entre deux couleurs.
Pour une application à froid, il existe plusieurs méthode. La première est de diluer progressivement une certaine quantité de cire dans une petite quantité d’essence, puis d’augmenter progressivement la quantité d’essence afin de la rendre souple et fluide. Cette cire à l’essence peut être adjointe à l’huile comme médium à peindre, ou utilisée comme liant à part entière. La seconde méthode consiste à faire fondre de la cire puis de la mélanger à un sel chimique (carbonate d’ammonium). C’est ce qu’on appelle la cire saponifiée. Cette cire se dilue alors à l’eau. D’ailleurs, on la connait depuis l’antiquité : les romains peignaient avec sur des supports en bois.
On peut réaliser une émulsion huile-eau ou eau-huile grâce à cette cire… C’est évidemment un de mes prochains objectifs de peinture ! Si c’est compliqué et fait intervenir plusieurs ingrédients alors je DOIS le faire, c’est comme ça sur Ars Artium.
2- Les liants irréversibles
Ces liants, une fois secs, ne se touchent plus du tout… Ils forment une couche plus solides que les films réversibles du paragraphe précédents, qui se travaillent en couches sans réveiller ou défaire la couche inférieure. Par exemple, si l’aquarelle se travaille par couche transparente, elle est virtuellement réversible à l’eau. C’est pour ça qu’on travaille sur un papier spécial qui conserve les pigments dans ses fibres. L’huile en revanche, va conserver les pigments au sein de sa structure. Car elle va polymériser autour.
La peinture à l’huile :
L’huile est un liant gras, composé de chaînes longues et incomplètes. Afin qu’une huile sèche, elle doit être composée d’acides gras mono ou polyinsaturés. Moins elle possède d’acides gras saturés et plus il reste de la place pour capter l’oxygène de l’air et donc, durcir. On appelle ce phénomène la « siccativité ». Pour peindre à l’huile et lier vos pigments, vous devez donc choisir une huile siccative. Parmi les huiles siccatives à destination des beaux-arts, on peut les huiles de lin et de noix. Ces deux huiles de mélange, liées aux pigments, sont résistantes sur la durée, et pour cause : les peintres les utilisent depuis plusieurs siècles. Le seul problème de l’huile de lin est qu’elle jaunit un peu avec le temps. Il suffit d’exposer sa peinture ou son flacon à la lumière du soleil.
L’huile est un liant extraordinaire et versatile. Seulement, il pose quelques soucis. En effet, l’huile ne se dilue pas à l’eau, mais aux essences minérales et/ou végétales. De plus, elle sèche très lentement. Cette force est aussi une faiblesse, car il faut parfois plusieurs années avant qu’une peinture finisse sa siccativation. Son utilisation exige le respect de certaines règles, afin de le durcissement se passe dans de bonnes conditions… Pas de panique, je vous prépare un article sur le sujet. En attendant, je vous laisse entre de bonnes mains, celles d’Amandine et de son blog Techniques de Peintures qui va vous expliquer la règle du gras sur maigre.
###L’acrylique :
L’acrylique, tout comme l’huile ou la caséine, va polymériser autour des pigments afin de former une couche picturale. On la dilue à l’eau, elle est simple et facile d’utilisation. Contrairement au deux premières, l’acrylique forme un film souple et très adhérent. Les polymères ici en revanche sont d’origine artificielle, ce sont des alcools chimiques créés en laboratoire. Donc, en terme d’avantage, le liant acrylique a de quoi séduire !
L’acrylique est une peinture extrêmement versatile. Des encres acryliques jusqu’aux peintures pâteuses presque solides, le choix est vaste et mérite un article à part entière. On manque de recul encore quant à la durabilité de ce liant mais, de point de vue, je n’en doute pas. C’est un film plastique, souple et plastifié. Et vu les qualités développées en laboratoire par certaines marques et la solidité des pigments actuelles, j’ai envie d’être optimiste sur la durabilité de cette peinture contemporaine.
Tempéra à l’œuf :
recette de Tempéra à l’œuf et à l'huile avec les pigments liquides Apy'Art by Serely
Et voilà, un nouveau bébé prêt à rejoindre la grande famille des Arabesques Spirituelles ! =^_^=
Vous avez un trésor dans votre cuisine ! Un liant efficace, naturel et accessible qui colle les pigments et qui se dilue à l’eau… C’est le jaune d’œuf. Mi-eau, mi huile, ce dernier sèche très rapidement sur votre support. Il forme une couche rigide qui agglutine les pigments en son cœur. Et il est irréversible. La peinture à l’oeuf se dilue à l’eau, se nettoie facilement et se prépare facilement.
En terme d’utilisation, l’œuf peut servir d’émulsion huile dans eau ou eau dans huile. En effet, combiné au blanc d’œuf qui est un tensioactif comme le savon, l’émulsion sera harmonieuse. Vous aurez alors une peinture à l’huile qui se dilue à l’eau. Néanmoins, le jaune d’œuf est riche en nutriments : les bactéries en raffolent. Il faudra préparer la peinture en petite quantité, au coup par coup.
En conclusion
J’espère que vous avez aimé cet articles portant sur les différents liants de peinture. J’espère que ça vous aura ouvert des horizons. Parfois, il ne faut pas hésiter à sortir des peintures en tubes proposées par les magasins de Beaux-Arts et essayer des choses non conventionnelles pour trouver chaussure à son pied. Ça tombe bien, c’est complétement cette démarche sur Ars Artium ! D’ici les prochains mois, vous trouverez des articles sur l’huile, l’acrylique, mais aussi sur la Tempéra à l’œuf ou encore l’encaustique. Je vous garde une place au chaud et je vous souhaite… bonne peinture à tous et à toutes !